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L'histoire du carreau Rodolphe est englobée dans celle plus vaste du Bassin Potassique qui doit son nom et son existence à la découverte d'un gisement de potasse au tout début du XXe
siècle.
Amélie ZÜRCHER, propriétaire terrienne, convaincue que le sous-sol haut-rhinois contient de grandes richesses, s'associe à un spécialiste des sondages, Joseph VOGT, et un brasseur, Jean-Baptiste
GRISEZ, pour sonder le sous-sol.
Un premier sondage effectué à Wittelsheim par la Société Bonne Espérance deJoseph Vogt en 1904 ne trouve pas le pétrole attendu, mais rencontre deux couches de potasse à forte teneur. C'est le début
de la saga de la potasse en Alsace.
Tour de sondage et premier bâtiment de la concession
minière Alex sur la commune de Feldkirch dans le Haut-Rhin.
Juillet 1904, une tour de forage, installée au sud de Wittelsheim extrait des carottes d’une couleur rose-orangée. Celles-ci tranchent avec les échantillons gris et blancs de sel gemme et d’autres noirs provenant des schistes, remontés jusqu’alors. Un groupe de cinq personnes, associés dans une société en participation, a financé ce sondage unique pour la recherche de charbon en Alsace. A 627 et à 649 mètres de profondeur la sonde va traverser des couches de potasse. L'initiateur et le maître d'œuvre de ce sondage est l'industriel Joseph Vogt. Ses associés sont J. Baptiste Grisez et son beau-frère le Dr Fischer, Amélie Zurcher et son frère Albert. Cette dernière, seule femme de l'équipe, déclarera bien plus tard, qu'elle avait fait, en 1893 déjà, un rêve prémonitoire où elle avait entrevu dans le sous-sol alsacien une énorme richesse. Elle aurait poussé Vogt à entreprendre ce forage.
Vue sur le village de Wittelsheim, dans le Haut-Rhin, berceau de la potasse.
Premier gisement, premier puits
Le premier puits, Amélie 1, est creusé en 1906 par la Gewerkschaft Amélie, et l'exploitation démarre en 1910. Mais à la suite d'une OPA le bassin est partagé entre divers propriétaires. Précisions (pdf)
Joseph VOGT, propriétaire à titre personnel de concessions au nord du bassin, crée la société Kali Sainte-Thérèse (KST) en 1910, en association avec des investisseurs lorrains et des capitaux français.
Les chevalements vont pousser comme des champignons puisqu'à la veille du premier conflit mondial, 13 puits sont en service.
Un minerai très recherché
Lors de leur sondage en juillet 1904, Vogt et ses associés découvrent un minerai de sel qu’ils ne connaissent pas. Son analyse dévoile qu'il s'agit de chlorure de potassium associé à du chlorure de sodium. Ce minerai est appelé "Sylvinite".
L'équipe apprend qu'elle a découvert un minerai très recherché, surtout en Allemagne. En effet, les Allemands avaient « inventé » ce produit dès 1860. Durant cette décennie, ces derniers vont trouver en Allemagne d’énormes gisements de potasse liée à du chlorure de magnésium. Leur minerai de sel est appelé carnallite. Parallèlement, des chimistes allemands mettent à jour les propriétés fertilisantes de cette matière. Les sels de potasse en tant que fertilisants sont commercialisés avec beaucoup de succès en Allemagne.
A la fin du XIXème siècle, la valeur intrinsèque de la potasse était supérieure à celle du charbon. Les investisseurs se ruent sur la potasse. En 1900, il existe en Allemagne du Nord plus de 100 puits en activité.
Pendant la guerre, la totalité du gisement est placée sous autorité allemande, les capitaux français bloqués et la société KST confisquée. Après l'armistice, KST reprend possession de ses Mines. Les mines allemandes sont placées sous séquestre dès l’arrivée des troupes françaises en Alsace. Les Mines sont divisées en 4 groupes à la tête desquels sont nommés des directeurs français. Le marché de vente de potasse en France était énorme et avait une belle perspective devant lui.
L’Etat français prit la décision de développer très rapidement le bassin potassique alsacien. Dès 1920, on embauche des milliers de mineurs. Malheureusement, le réservoir de la main d’œuvre locale n’était pas très large. Aussi fait-on appel, à travers une convention signée avec la Pologne, à de la main-d’œuvre polonaise. Entre 1921 et 1930 des milliers de Polonais débarquent en France pour alimenter tous les bassins miniers de France (charbon, mines de fer, mines de potasse).
Naissance des Mines domaniales de potasse d'Alsace
KST, avec les Mines Alex, Rodolphe et Ensisheim, reste un groupe privé à côté des Mines sous séquestre. La loi du 26 mars 1921 autorise l’acquisition par l’Etat des Mines de Potasse d’Alsace sous séquestre. Mais il faut attendre le 24 mai 1924 pour que l’Etat procède effectivement au rachat des Mines pour 208 millions de francs, payables en 17 annuités. Et la nationalisation ne sera effective qu’avec la loi du 23 janvier 1937 « portant fixation du régime définitif des Mines domaniales de potasse d’Alsace (MDPA) et organisation de l’industrie de la potasse ».
Le Bassin potassique alsacien en 1930