Il y a un peu plus cent ans l’aventure de la potasse démarrait pour la commune de Pulversheim par le fonçage du puits Rodolphe.
La décision de creuser le puits Rodolphe sur le ban de Pulversheim a été prise par la société Kali Sainte-Thérèse (KST) le 10 octobre 1910. Le fonçage débutait le 28 avril 1911. Interrompu à la profondeur de 89 mètres, le creusement ne sera repris qu’en avril 1912.
Le 1er août 1913, la couche inférieure de potasse est atteinte à 694 mètres. Le puits est terminé peu après à la profondeur de 711 mètres. D’un diamètre de 5 mètres jusqu’à 59 mètres de profondeur,
il se rétrécit ensuite à 4,50 mètres.
Le chevalement
Le chevalement de Rodolphe 1, toujours debout, a été construit par l'entreprise Zehne-Tscheiller. Du type allemand, avec faux-carré porteur, deux molettes superposées, haut de 40 mètres, il est soutenu par deux bigues en poutrelles à treillis en fer.
Pendant 15 ans, Rodolphe a servi à l’aérage de la mine Alex
Les puits vont toujours (au moins) par deux ; pour des questions d’aérage et de service. L’un sert à l’extraction du minerai, l’autre à la circulation du matériel et des mineurs. Rodolphe 1 a d'abord
servi à l’aérage de la mine Alex, creusée à moins d’un kilomètre.
Fin 1915 le carreau est endommagé par une explosion. Le chevalement, peu attent doit quand même être réparé en 1920. Le puits Rodolphe 2 est foncé à partir de 1925 à une centaine mètres de Rodolphe 1
qui fonctionne ensuite comme puits d’extraction de 1929 à 1954.
Les mineurs en sortiront près de 40 millions de tonnes de minerai. Théâtre de l’accident le plus meurtrier des mines de potasse (23 morts en 1940), il sera ravalé en 1958. Le puits qui stoppe son
activité en 1976 est remblayé en 1984. En savoir plus
La machine d’extraction
La machine d’extraction, encore en place et en état de marche aujourd’hui, date de 1912. Equipée d’un moteur ELMAG (la SACM de l’époque allemande) de 404 KW, elle fonctionne d’abord avec bobines et
câbles plats.
L’originalité de la machine réside dans l’adjonction entre les bobines, en 1929, d’une poulie Koepe de 5 mètres de diamètre, monocâble. C’est la plus ancienne machine d’extraction encore en état de marche dans le Bassin Potassique.
La machine d’extraction du puits Rodolphe a été entièrement rénové.
Sauvés de la démolition
Les deux chevalements et des installations de surface ont été sauvés de la démolition grâce à l’Ecomusée d’Alsace qui jouxte le carreau et au Conseil Général du Haut-Rhin qui en est aujourd’hui
propriétaire. Une animation muséale, baptisée « Clair de Mine », initiée par l’écomusée y a eu lieu pendant deux saisons (2004 et 2005).
Aujourd’hui le carreau Rodolphe est ouvert en partie, et sur demande, à la visite, commentée par les anciens mineurs du Groupe Rodolphe servent de guides, qui espèrent pouvoir mettre en œuvre un projet global de valorisation des lieux avec le soutien du département.
Le fonçage du puits
Le fonçage du puits désigne son creusement en termes miniers. Celui de Rodolphe 1 a été effectué par la Rheinische Westfalien Schachtbau AG. Dans le sous-sol du Bassin potassique la difficulté est d’éviter, dans les premiers mètres, l’eau de la nappe phréatique.
La technique employée a été est celle de la « trousse coupante ». Ce procédé utilisait une « tour » circulaire (avec un sabot en biseau) de 5,50 m de diamètre constituée d’un cuvelage en fonte de 5,10 m de diamètre intérieur, qui fut enfoncé par des vérins hydrauliques jusqu’à 64 m.
Le travail de creusement s’est fait au fur et à mesure, à l’intérieur de la tour, avec des marteaux à air comprimé. Puis un cuvelage de type allemand a été posé jusqu’à 282 m. Ensuite on a utilisé de la maçonnerie en brique pour consolider les parois.
Le bâtiment du puits
D'une forme quadrangulaire, bâti sur le modèle d'un temple gréco-romain, mesurant 14 m de large sur 24 m de long et 14 m de hauteur au faîtage, il a été rajouté en 1932. Construit en béton, briques et pierres par l'entreprise Killy de Sélestat, il abritait également la lampisterie, reliée au vestiaire fond par une passerelle en bois démolie au début des années 80.
Quelques chiffres
Profondeur : 711 mètres
Diamètre : 5 m puis 4,50 m
Extraction : 39,5 millions de tonnes de minerai
A savoir
> Rodolphe est la seule mine du bassin qui possède encore ses chevalements d’origine, l’un métallique, l’autre, en béton armé.
> Le nom du puits aurait pour origine le prénom du dernier baron de Bollwiller, mort en 1616.
> Une minuscule cité minière, la cité Rodolphe, constituée de trois maisons a été bâtie dans une petite enclave qui jouxte le carreau.
> Coup de grisou et 25 morts en 1940 à la mine Rodolphe. Ce fut l’accident le plus meurtrier des mines de potasse.
Aujourd’hui lorsqu’on parle de la potasse, on pense aux MDPA, les Mines de Potasse d’Alsace, auparavant nommées Mines Domaniales de Potasse d’Alsace. Mais l’histoire commence (presque) par KST.
Le puits Rodolphe faisait partie de Kali Sainte-Thérèse (KST), société minière fondée par Joseph Vogt (en photo ci-contre), l’un des « inventeurs » du Bassin Potassique. Ce maître sondeur implanté à Niederbruck et qui espérait trouver du pétrole, a découvert, en 1904, à Wittelsheim, le gisement de potasse. Il a réuni ensuite des investisseurs pour l’exploiter.
A peine l’extraction commencée, le groupe d’actionnaires est victime d’une OPA menée par la puissante industrie de la potasse allemande. Resté propriétaire de concessions s’étendant sur 2 200 hectares dans les villages d’Ungersheim, Ensisheim, Pulversheim et Battenheim, il fonde KST en 1910 et son fils Fernand en devient directeur.
Confisquée par les Allemands de 1914 à 1918, KST reprend possession de ses mines après l'armistice et les mines allemandes sont placées à leur tour sous séquestre. Après des années de tractations politiques et financières elles sont finalement rachetées par l’état français.
La nationalisation devient effective avec l'arrivée au pouvoir de la gauche, et la loi du 23 janvier 1937 « portant fixation du régime définitif des Mines Domaniales de Potasse d’Alsace (MDPA) ». KST connaît sa période faste entre 1920 et 1932, avant que la crise économique ne frappe le bassin.
Entre 1940 et 1945 période d’occupation et d’annexion de l’Alsace au IIIe Reich, les EKW (Elsässiche Kali Werke) regroupent les MDPA et KST. A la libération, la direction technique unique par les
MDPA est maintenue. En 1959, KST loue finalement ses mines aux MDPA. (ci-contre : tours de sondage)
Celles-ci, devenues Mines de Potasse d’Alsace en intégrant la holding Entreprise Minière et Chimique (EMC) en 1967, sont en liquidation depuis 2009.
Du passé au présent
1911 : Fonçage de Rodolphe 1
1913 : Mise en service
1925 : Fonçage de Rodolphe 2
1929 : Mise en service de Rodolphe 2
1976 : Arrêt de l’exploitation
1980 : Début des démolitions
1984 : Remblayage des deux puits
1987 : Acquisition par l'Ecomusée
2004 : 1re animation « Clair de Mine »
2006 : Dévolution du carreau au CG 68
2008 : Projet du Groupe Rodolphe
2011 : Premières réhabilitations